Romper el ayuno

 

por María Álvarez; foto: Ana Lorenzana

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Crecí, como tantos otros, en una familia en la que la comida es el centro de la convivencia. Mi mamá cocinaba desde muy joven con su abuela, y aprendió y mejoró todas las recetas importantes de su herencia y la mía: la paella del tío Ismael, los romeritos de la tía Martita, las croquetas de pollo de la bisabuela Mercedes, y un larguísimo etcétera. De esos sabores de mi infancia, el que me emociona más no tiene que ver con la cocina. Es un sabor que no implica la transformación de un alimento en su esencia química. Tiene que ver con un momento que se repite en condiciones casi idénticas a lo largo de muchos años, asociado a una persona, a una sensación de seguridad y pertenencia.

Si tuviera que decir cuál es para mí ese momento proustiano, ese sabor en donde se encuentra mezclado un recuerdo a la vez preciso y constante, aislante, que hace que se levante frente a mí ‹el edificio inmenso del recuerdo› es el sabor de la toronja. La textura firme y membranosa de cada gajo, la sensación fresca del jugo al romperlo con los dientes, el sabor levemente dulce, levemente ácido y levemente amargo que contiene, mezclado con unos granitos de azúcar. A veces más un perfume que un sabor. En todo caso un sabor sutil, un sabor que limpia la boca, que rompe el ayuno delicadamente.

Hay una foto que podría indicar que fue uno de los primeros alimentos que probé. Pero esos recuerdos están más informados por la repetición del ritual en los años siguientes que por la fotografía. Todas las mañanas de su vida, mi abuelo Oscar, hombre de costumbres alimenticias inflexibles, antes de tomar café rompía el ayuno con media toronja, sin importar la época del año. Evidentemente, la calidad del cítrico variaba con las temporadas, obteniendo las mejores en el invierno, lo cual parecía influir también en el ánimo de mi abuelo. Cuando se sentaba, él mismo escogía las toronjas; su mitad y la de los demás. Y ahí estaba su cuchillito especial para sacar los gajos. Con toda parsimonia, usando sus lentes de vista cansada, cortaba cada gajo mientras platicaba. No era un ritual silencioso, eran movimientos mecánicos idénticos acompañados de una conversación siempre distinta. Después le ponía media cucharadita de azúcar blanca; no más, no menos. Yo le copiaba. Misma cantidad de azúcar, sacar cada gajo con la cuchara y comerlo al mismo ritmo que él. Al final la tomaba con la mano y exprimía la cantidad exacta de jugo que cabía en la cucharita. Ésa era la mejor parte: la más dulce. El jugo mezclado con el azúcar.

 

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La toronja no tiene un sabor particularmente interesante en sí mismo, pero para mí es el sabor que recuerda la voz, las manos, la conversación, las actitudes de mi abuelo; el paso por el mundo de uno de mis más importantes compañeros, no sólo de mi infancia, sino de mi vida.

La infancia es un país extranjero, de costumbres distintas, donde todo se hace de otra manera. Como sabemos que no se puede volver, nos asimos con fuerza a las sensaciones, a los recuerdos y a los sabores que ahí experimentamos. Algunos incluso los instauramos, los volvemos permanentes, les alargamos la vida para no dejar de ser quienes fuimos inicialmente. Así, los sabores de nuestra infancia, de nuestros antepasados, de nuestras familias, se vuelven nuestros. Muchos de ellos son importantes porque están ligados a celebraciones, a la identidad de la que nos alimentamos, a la personalidad de alguien que nos quiere desde siempre.


La madeleine

«Il y avait déjà bien des années que, de Combray, tout ce qui n'était pas le théâtre et le drame de mon coucher, n'existait plus pour moi, quand un jour d'hiver, comme je rentrais à la maison, ma mère, voyant que j'avais froid, me proposa de me faire prendre, contre mon habitude, un peu de thé. Je refusai d'abord et, je ne sais pourquoi, me ravisai. Elle envoya chercher un de ces gâteaux courts et dodus appelés Petites Madeleines qui semblent avoir été moulés dans la valve rainurée d'une coquille de Saint- Jacques. Et bientôt, machinalement, accablé par la morne journée et la perspective d'un triste lendemain, je portai à mes lèvres une cuillerée du thé où j'avais laissé s'amollir un morceau de madeleine. Mais à l'instant même où la gorgée mêlée des miettes du gâteau toucha mon palais, je tressaillis, attentif à ce qui se passait d'extraordinaire en moi. Un plaisir délicieux m'avait envahi, isolé, sans la notion de sa cause. Il m'avait aussitôt rendu les vicissitudes de la vie indifférentes, ses désastres inoffensifs, sa brièveté illusoire, de la même façon qu'opère l'amour, en me remplissant d'une essence précieuse: ou plutôt cette essence n'était pas en moi, elle était moi. J'avais cessé de me sentir médiocre, contingent, mortel. D'où avait pu me venir cette puissante joie? Je sentais qu'elle était liée au goût du thé et du gâteau, mais qu'elle le dépassait infiniment, ne devait pas être de même nature. D'où venait elle? Que signifiait-elle? Où l'appréhender?

            (…)

            Et tout d'un coup le souvenir m'est apparu. Ce goût c'était celui du petit morceau de madeleine que le dimanche matin à Combray (parce que ce jour-là je ne sortais pas avant l'heure de la messe), quand j'allais lui dire bonjour dans sa chambre, ma tante Léonie m'offrait après l'avoir trempé dans son infusion de thé ou de tilleul. La vue de la petite madeleine ne m'avait rien rappelé avant que je n’y eusse goûté; peut-être parce que, en ayant souvent aperçu depuis, sans en manger, sur les tablettes des pâtissiers, leur image avait quitté ces jours de Combray pour se lier à d'autres plus récents; peut-être parce que de ces souvenirs abandonnés si longtemps hors de la mémoire, rien ne survivait, tout s’était désagrégé; les formes - et celle aussi du petit coquillage de pâtisserie, si grassement sensuel, sous son plissage sévère et dévot - s'étaient abolies, ou, ensommeillées, avaient perdu la force d'expansion qui leur eût permis de rejoindre la conscience. Mais, quand d'un passé ancien rien ne subsiste, après la mort des êtres, après la destruction des choses, seules, plus frêles mais plus vivaces, plus immatérielles, plus persistantes, plus fidèles, l'odeur et la saveur restent encore longtemps, comme des âmes, à se rappeler, à attendre, à espérer, sur la ruine de tout le reste, à porter sans fléchir, sur leur gouttelette presque impalpable, l'édifice immense du souvenir.

            Et dès que j'eus reconnu le goût du morceau de madeleine trempé dans le tilleul que me donnait ma tante (quoique je ne susse pas encore et dusse remettre à bien plus tard de découvrir pourquoi ce souvenir me rendait si heureux), aussitôt la vieille maison grise sur la rue, où était sa chambre, vint comme un décor de théâtre s'appliquer au petit pavillon, donnant sur le jardin, qu'on avait construit pour mes parents sur ses derrières (ce pan tronqué que seul j'avais revu jusque-là); et avec la maison, la ville, depuis le matin jusqu'au soir et par tous les temps, la Place où on m'envoyait avant déjeuner, les rues où j'allais faire des courses, les chemins qu'on prenait si le temps était beau. Et comme dans ce jeu où les Japonais s'amusent à tremper dans un bol de porcelaine rempli d'eau, de petits morceaux de papier jusque-là indistincts qui, à peine y sont-ils plongés s'étirent, se contournent, se colorent, se différencient, deviennent des fleurs, des maisons, des personnages consistants et reconnaissables, de même maintenant toutes les fleurs de notre jardin et celles du parc de M. Swann, et les nymphéas de la Vivonne, et les bonnes gens du village et leurs petits logis et l'église et tout Combray et ses environs, tout cela qui prend forme et solidité, est sorti, ville et jardins, de ma tasse de thé.»